Les veilleurs, magistral thriller onirique
Les veilleurs porte merveilleusement bien son titre. Car, en plus de mettre le sommeil et les rêves au cœur de son intrigue, le premier roman de Vincent Message est de ceux à vous faire passer des nuits blanches. Dès la prise en main, le livre vous impose sa propre logique. On tient dans sa main ce pavé inhabituel pour un roman français, encore plus pour un premier texte. On lit les cinq premières pages. Encore deux, puis deux encore… Inutile de lutter : les lectures en cours attendront. Car le livre ne ressemble à rien de ce que la littérature française nous a habitués depuis longtemps.
En quelques minutes, Oscar Nexus passe du statut d’anonyme à celui d’attraction médiatique et judiciaire de la ville de Regson. Veilleur de nuit invisible, il descend un matin dans la rue et abat trois personnes. Quelques secondes après, il s’endort profondément sur les cadavres. Pour le gouverneur de la ville, Samuel Drake, son cas doit être réglé au plus vite : sa maîtresse Ania Waleska fait partie des victimes, et Drake craint une tentative de déstabilisation à la veille d’une campagne électorale. Bien qu’amnésique et ne pouvant expliquer son geste, Nexus est condamné à la perpétuité. Reste une question : possédait-il toutes ses facultés mentales au moment de crime ?
Afin de déterminer s’il doit aller en prison ou en institut psychiatrique, la justice charge deux hommes d’analyser Nexus. Joachim Traumfreund, psychanalyste aux méthodes peu orthodoxes, et Paulus Rilviero, un flic sur le retour, vont isoler le meurtrier à l’Aneph, une villa étrange bâtie à flanc de montagne. De leurs entretiens, les deux hommes vont découvrir que Nexus vit pendant ses rêves une vie parallèle, dans le Séabra, un désert au centre de conflits entre tribus aux origines lointaines. Peu à peu, Traumfreund et Rilviero plongent avec lui dans ce monde imaginaire où se trouve la clé de ses actes à Regson.
Les veilleurs manie à merveille les faux-semblants. Par son postulat, d’abord : utilisant la logique d’un roman à suspense de haut niveau, il apparaît bien vite que le livre dépasse ce genre. Car il plonge ses lecteurs dans deux univers de fiction parallèle : la ville de Regson, inspirée des mégapoles que nous connaissons, et le Séabra, ce monde onirique où se mêlent pratiques ancestrales et interrogations d’aujourd’hui (face à la consommation des villes, le désert avance : les gouverneurs régionaux du pays vont-ils faire force commune pour le stopper ?). Bien vite, le livre embrasse de nombreux genres littéraires, sans jamais lâcher prise sur son point de départ. Nexus est-il fou ? La question hante les personnages et le lecteur tout au long du livre, et lorsque des pistes commencent à se dessiner, aux alentours de la page 500, les cent-trente qui vont suivre n’ont pas fini de nous réserver des surprises…
Lorsque l’on referme le livre, une des seules certitudes qu’il nous reste est celle d’avoir découvert un nouvel auteur à part entière. Car l’écriture de Vincent Message est tout simplement stupéfiante : oscillant entre une intrigue à trois personnages et une autre aux innombrables protagonistes, l’auteur de 26 ans sait aussi moduler son texte, passant d’un narrateur à l’autre au sein d’un même paragraphe, sans jamais perdre son lecteur. Une fois la dernière page achevée, on replongerait presque dans le livre pour en découvrir d’autres facettes. Une chose est sûre : avec ses Veilleurs, Vincent Message réveille la rentrée littéraire !
« Les veilleurs » de Vincent Message, Éditions du Seuil, 640 pages, 22€. Parution le 20 août.
Page suivante : le début du livre
Pages: 1 2
2 réponses à “Les veilleurs, magistral thriller onirique”
Vous devez être inscrit pour laisser un commentaire.Si vous souhaitez ajouter une photo à votre profil, utilisez Gravatar
Tout cela m’a l’air bien alléchant.
De plus, pour un premier roman, ça semble assez fort.
Il a déjà décroché un prix, si je ne m’abuse (quoique, les prix littéraires, vous me direz…)
Bon, c’est décidé, je craque.