Cinquante nuances de Grey, un phénomène littéraire à tendance sado-maso [MAJ]
Comme l’explique le Wall Street Journal, c’est justement la diffusion électronique du livre qui est à l’origine du succès du livre. Le succès fulgurant des liseuses aux Etats-Unis a en effet permit à de nombreuses jeunes mères de familles de découvrir ce livre en toute discrétion, sans risquer que leur lecture soit découverte dans les espaces publics. Au point de donner à la trilogie son surnom, “Mommy porn” (Le porno de Maman), et d’entraîner la création de nombreux sites d’édition numérique entièrement dédiées à la littérature érotique. Ironie du sort : E.L. James avait conçu à l’origine ses ouvrages comme une “fan fiction” inspirée de la saga adolescente Twilight, dont les scènes d’amour sont plus que chastes !
La trilogie Fifty shades ne manque toutefois pas de détracteurs, en grande partie à cause de son manque évident de qualités littéraires, et de plusieurs phrases et répliques proches du ridicule (il est en effet probable que E.L. James, qui a produit en quelques mois trois volumes de plus de 500 pages chacun, n’a pas accordé beaucoup d’importance à son style). Son plus virulent critique, l’auteur Andrew Shaffer, a d’abord fustigé et moqué les ouvrages sur son compte Twitter, @EvilWylie. Mais il tirera bientôt partie du succès, en publiant dès cet été chez Da Capo Press une parodie de l’ouvrage, titrée Fifty shames of Earl Grey (en référence au nom du thé Twinnings que boit Anastasia tout au long des livres !), dont de larges extraits sont déjà disponibles sur son blog.
Chaque succès littéraire aux Etats-Unis finissant inévitablement par une adaptation au cinéma, il n’est pas étonnant que les droits du livre aient été rapidement acquis. Au terme d’une guerre d’enchères entre dix studios (parmi lequel la chaîne HBO et Sony) comme Hollywood en a le secret, c’est finalement Focus Features, filiale de Universal, qui a acquis mi-mars les droits d’adaptation de la trilogie pour 5 millions de dollars. Le contrat est toutefois l’un des sujets de prédilection de la profession, à cause des demandes de contrôle sans précédent de l’auteur E.L. James et de son agent londonienne Valerie Hoskins. James exige en effet de pouvoir mettre son veto sur tous les choix liés aux futurs films, du nom des acteurs et réalisateur au design de l’affiche ! D’autant qu’Hollywood, une fois calmée de la frénésie de l’acquisition des droits, se demande quel pourra être le succès commercial d’un film traitant si crûment de pratiques sado-masochistes…
En attendant, il est probable que la trilogie Fifty shades ne tardera pas à gagner l’étranger. On peut légitiment penser que les éditeurs internationaux sont d’ores et déjà en train de se battre pour les droits de traduction. En France, les éditions Jean-Claude Lattès, déjà propriétaires du phénomène Da Vinci Code, ont acquis les droits de la trilogie. Le premier tome paraîtra en France le 17 octobre, sous le titre Cinquante nuances de Grey, dans une traduction de Denyse Beaulieu. Les volumes suivants seront publiés au cours du premier trimestre 2013.